Le piano pleure son incapacité à se faire texte.
L’eau qui coule de ses notes est une langue étrangement inquiétante, qui dit mais ne parle pas. Paroles incomprises d’une voix quelque part connue, adressées directement à une mélancolie informe, nichée comme un fœtus au cœur de notre inconscient.
Le piano est une eau qui coule sur des rochers martelés. L’eau chante comme un envol. La technique un jour vaguement apprise et oubliée crée un écho indistinct. Chaque note devient vapeur pour s’élever, un instant suspendue, rattrapée et tue par la suivante. Le son vient du dehors et du dedans, ou peut-être va-t-il vers le dedans et le dehors.
Le piano s’est tu. Claquement du couvercle sur le bois. Schubert n’est de nouveau plus que le nom d’un compositeur mort sur une partition, rangé dans le tiroir de bureau d’un individu quelconque.